L'Argonnaute est un journal de tranchée, crée au sein du 2e bataillon du 25e régiment d’infanterie, en janvier 1916. Son titre est un jeu de mot : il fait référence à la fois aux Argonautes de la mythologie grecque et à la région dans laquelle ce bataillon était alors mobilisé, l'Argonne. Composé essentiellement de Normands et de Bretons, le 25e R.I. changera de secteur à plusieurs reprises : après l’Argonne, Verdun, la Somme, les Eparges et enfin, l’Alsace, région dans laquelle paraît le dernier numéro de l’Argonnaute.
L'Argonnaute, N°2 - 15 Janvier 1916
Tantôt bimensuel, tantôt mensuel, l’Argonnaute, malgré les difficultés liées aux aléas de la vie sur le front, paraît sans interruption jusqu’en décembre 1918-janvier 1919, soit soixante numéros. Chaque numéro compte 4 à 12 pages, de format 20 x 31 cm. Comme pour de nombreux autres journaux de tranchée, le mode de fabrication reste artisanal : les feuilles sont polycopiées à la gélatine à partir de matrices manuscrites. A partir de février 1917, à l’encre violette, s’ajoute l’emploi d’autres couleurs. Le tirage, obligatoirement plus limité que dans le cas d’un titre imprimé, atteint environ 80 exemplaires. Il s’effectue soit en tranchée, au poste de secours du 2e bataillon, soit au repos, dans des locaux de fortune.
La publication est dirigée par deux caporaux du 25e R.I., Henry Jacques, poète et collaborateur du Petit Journal avant la guerre, et Maurice-Charles Renard. Leur nom n’apparaît pas dans les premiers numéros mais ils rédigent pratiquement tous les textes. Maurice Dévelay quant à lui, fait les dessins, sous le pseudonyme de Zim tandis que le caporal Arthur Héroult s’occupe du tirage. Après la mort de Zim à l’âge de 22 ans à Maucourt (Somme) le 30 août 1916, plusieurs dessinateurs se succèdent : Marcel Jeanne, Stabi, Henri Duvassal, Pierre Galle. Au même moment, H. Jacques, grièvement blessé par trois éclats d’obus au rein, continue d’envoyer des textes depuis son lit d’hôpital tandis que Renard qui sera lui aussi blessé plus tard, poursuit la publication, démentant ainsi l’annonce de la disparition probable de l’Argonnaute parue dans Le Journal du 15 octobre 1916.
Le premier sous-titre du journal, Journal humoristique mais intermittent interdit formellement aux embusqués, donne le ton : le but principal est de soutenir le moral des troupes en les divertissant, tout en produisant des textes d’une bonne tenue littéraire. Le journal publie des chansons, des chroniques littéraires et musicales, des pastiches (publicités, petites annonces, communiqués officiels émanant des autorités), ainsi que des « romans-feuilletons » et textes littéraires s’étendant sur plusieurs numéros. Les auteurs tentent de pérenniser certaines rubriques : « Le paquet du civil », « Chronique de la mode », « Au rab du rab », « Conseil à un jeune poète », « Savoir-vivre », « Le Mot ». Paraissent aussi des numéros spéciaux, dédiés notamment aux poèmes d’H. Jacques ou aux dessins de Zim. L’humour n’exclut pas l’expression de sentiments patriotiques et l’évocation des difficultés de la vie quotidienne, la peur de la mort et de la blessure, dans des textes ou des dessins au ton plus grave. Au fil des numéros et notamment en 1918, la lassitude se fait plus présente avec l’adoption d’un nouveau sous-titre, Journal de guerre.
La BDIC conserve dans ses collections les n° 1, 2, 7 à n° 54 de l’Argonnaute ainsi que certains numéros spéciaux, dont la version numérisée intégrale est disponible dans sa bibliothèque numérique : http://argonnaute.u-paris10.fr/ark:/naan/041929b818
Dossier réalisé par Sophie Gontcharoff et Clothilde Benoït (étudiantes UPON L3 PPE)
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Une de janvier 1916
L'Argonnaute, n° 1 (1er janvier 1916) : une. La structure générale de la une restera la même au fil des numéros : le titre encadré par deux petits dessins, une illustration centrale et des mentions relatives aux conditions de vente des numéros (gratuits pour les soldats, 20 « ronds » pour les civils). La référence au 2e bataillon du 25e RI ne viendra qu’en 1917. Ici une allusion indirecte : « Tous les poilus du Xe de ligne lisent l’Argonnaute ». Cette illustration sera reprise dans la « une type » des numéros qui suivront la mort de Zim (août 1916). [Droits : licence ouverte]
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Editorial de janvier 1916
L'Argonnaute, n° 1 (1er janvier 1916), p. 2. La page de titre est généralement suivie d’un éditorial. Dans ce premier éditorial, le journal se présente comme fait par des soldats pour des soldats. Contrairement à d’autres titres qui font explicitement référence au régiment d’appartenance des auteurs, l’Argonnaute ne fait ici mention que du 2e bataillon. Dans les premiers numéros, les textes sont signés collectivement « l’Argonnaute » comme ici, ou restent anonymes. En ce début 1916, on espère encore la victoire proche : « Laissez-passer 1915 et respirez-mieux dans l’air nouveau de la jeune année 1915, née au bruit des canons et morte, hier, au bruit toujours plus fort des canons, fut l’année des préparations héroïques : 1916, qui commence, ne sera-t-elle pas celle de la victoire ? » [Droits : Licence ouverte]
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Publicité pastiche, juin 1916
L'Argonnaute, n° 13 (1er juin 1916), p. 18. Publicité pastiche détournant le personnage de Michelin, Bibendum et son slogan depuis 1893 « Le pneu Michelin boit l’obstacle » qui devient ici : La grande offensive... par le fer et par le pneu !!! En avant les gars !!!! « Bibendum » est avec vous et « Bibendum » boit l'obstacle !! Les pastiches de publicités sont très fréquents dans l’Argonnaute [Droits : Licence ouverte]
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Cartes du numéro 27
L'Argonnaute, n° 27 (mai 1917), p. 6. Parodie des tickets de rationnement alimentaire utilisés à l’arrière avec une « carte d’amour », une « carte de pinard » et une « carte de tranchée » : « […] les deux premières cartes que L'Argonnaute, - toujours bien informé- présente à ses lecteurs, carte de pinard et carte d'amour, sont pour donner à nos camarades un peu plus de ces deux choses indispensables qu'il est si peu facile de se procurer dans la zone des combats. Quant à la troisième carte que nous reproduisons, carte de tranchée – projet qui sera réalisé très prochainement - elle est instituée par les civils qui pourront profiter, à leur tour, de la délicieuse vie du front. Tout le monde en voudra !!! » [Droits : Licence ouverte]
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Pastiche d'un appel à l'emprunt
L'Argonnaute, n° 20 (octobre 1916), p. 13. Détournement de l’appel au deuxième emprunt de la Défense nationale lancé en octobre 1916, avec un appel à l’emprunt pour l’Argonnaute : « Placements à fonds perdus. (Recommandé aux pères de famille) » [Droits : Licence ouverte]
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Roman-feuilleton
L’Argonnaute, n° 21 (novembre-décembre 1916), p. 10. La page débute par une « chronique sportive » avec un concours de chevaux de frise témoignant de l’importance de cet animal sur le front. Le favori serait « Le bouffeur de boyaux » entraîné par « La Pécaille ». Elle est suivie par un pastiche publicitaire pour le parfum « Brise de feuillées » et la suite du roman-feuilleton « Les chevaliers de la gniolle ou les mystères du boyau de X… Cinquième partie : Le poète et le sous-marin. Chapitre 2 : Le naufrage ». L’Argonnaute lancera plusieurs romans-feuilletons qui resteront inachevés [Droits : Licence ouverte]
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Exemple d’une chronique récurrente : Le paquet du civil
L’Argonnaute n° 9 (mai 1916), p. 8. La rubrique « Le paquet du civil » apparaît dans plusieurs numéros et reprend le traditionnel « courrier des lecteurs » en publiant des lettres de lecteurs de l’arrière. Ici, fac-similé de la lettre d’une cuisinière parisienne. L’arrière et les « civils » sont souvent opposés aux soldats, parce qu’à l’abri. La lettre est d’ailleurs suivie d’un pastiche de communiqué officiel : « Rien à signaler sur les différents fronts de l’arrière. Les civils tiennent toujours bien » [Droits : Licence ouverte]
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Numéro spécial poésie
L’Argonnaute n° 12 (« hors date », 1916), une. Le journal fera paraître différents numéros spéciaux dont ce numéro spécial de poèmes qui rappelle l’importance de la poésie dans cette publication, sous l’influence d’Henry Jacques, auteur de tous les poèmes et autres chansons en vers publiés dans l’Argonnaute. Le ton des poèmes, comme ici L’aurore, est en général grave et fait souvent place à la crainte de la mort. Remarque : l’exemplaire de ce numéro conservé dans les collections de la BDIC porte l’envoi manuscrit de l’auteur « Hommage de l’auteur Henry Jacques » [Droits : Licence ouverte]
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Vie quotidienne
L’Argonnaute n° 13 (juin 1916). Zim représente ici une scène de vie quotidienne dans les les tranchées : la distribution de la soupe avec à l’arrière-plan un soldat faisant le guet.
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Scènes de la vie quotidienne
L’Argonnaute n° 42 (janvier 1918), p. 6. « Les images du front » par Henri Duvassal : scènes de la vie quotidienne (« Au créneau », « Une bonne pipe », « L’eau pour la cuistance », « Au jus », entretien des chevaux) [Droits : Licence ouverte]
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La mort
L’Argonnaute n° 13 (juin 1916), p. 13. Poème « Au bord de la route » d’Henry Jacques accompagné d’un dessin de Zim. Le texte évoque la fatigue des soldats obligés de se déplacer sous la pluie et dans la boue pour finir sur une note dramatique : le cadavre d’un « petit » sur le talus [Droits : Licence ouverte]
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La forêt d'Argonne
L’Argonnaute n° 9 (mai 1916), p. 6. Un dessin de Zim (daté d’avril 1916) qui représente les bois de l’Argonne. La destruction des paysages, en particulier des arbres, par les combats est très présente dans les illustrations comme dans les textes.
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La forêt d’Argonne
L’Argonnaute n° 11 (mai 1916), p. 6. « Dialogue des bois de l’Argonne » : les jeux de mots sur les noms des arbres détruits par l’artillerie ennemie qui n’a pas réussi à prendre le secteur [Droits : Licence ouverte]
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La destruction des arbres
L’Argonnaute n° 47 (avril 1918), p. 8. « Nous n'irons plus au bois, les arbres sont coupés ! ». Deux faunes, bien dans l’esprit de la culture littéraire classique qui imprègne la publication, déplorent la destruction de la forêt par les combats [Droits : Licence ouverte]
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Le départ
L’Argonnaute n° 15 (juillet 1916), une. Ce numéro fait suite au départ du 25e RI qui quitte le secteur de la forêt d’Argonne. Il est donc « fait le long de la route ». Humour et réalisme se côtoient comme souvent : transfert des hommes et des chevaux dans des wagons surchargés. Le wagon empli de soldats porte les mentions « C’est complet » et « Fragile » [Droits : Licence ouverte]
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Le départ
L’Argonnaute n° 15 (juillet 1916), p. 2. Poème « Les adieux » d’H. Jacques qui évoque les dix mois passés dans le secteur de l’Argonne et la résistance des troupes françaises qui ont empêché, au prix de lourdes pertes, la conquête du secteur par l’ennemi [Droits : Licence ouverte]
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Mort de Zim et blessure d’Henry Jacques
L’Argonnaute n° 20 (octobre 1916), p. 2 : Maurice-Charles Renard signe un texte dans lequel il rend hommage à Zim mort en août et Henry Jacques grièvement blessé qui, depuis son lit d’hôpital, poursuit son travail de rédacteur. La une du numéro 20 reprend l’illustration de la une du numéro 1 de janvier 1916 [Droits : Licence ouverte]
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N° spécial franco-américain
L'Argonnaute, n° 38 (octobre 1917), p. 8. Le n° 38 est un numéro spécial franco-américain dans lequel le journal fait appel à des contributeurs extérieurs, dont Stanley Rowland, qui réalise ce dessin représentant des brancardiers en train d’évacuer un blessé tandis que d’autres blessés gisent au sol et qu’une ambulance de la Croix Rouge américaine attend au premier plan [Droits : Licence ouverte]
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N° spécial franco-américain
L'Argonnaute, n° 38 (octobre 1917), p. 10. « Aux Américains morts pour la France » : Henry Jacques rédige le poème et Pierre Salle l’illustration qui reprend les motifs du drapeau des Etats-Unis [Droits : Licence ouverte]
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Une du numéro 44
L'Argonnaute, n° 44 (mars 1918), une. La lassitude se fait sentir : un poilu, entre deux attaques, rêve d'une vie idyllique, sans guerre (travaux des champs, campagne paisible, fête de village). Depuis le n° 42 (janvier 1918), le sous-titre « Journal de guerre » remplace « magasine de tranchée » [Droits : Licence ouverte]
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La guerre en 1921
L'Argonnaute, n° 44 (mars 1918), p. 3. Série de dessins d’H. Duvassal sur « La guerre en 1921 » et l’amélioration des conditions de vie du poilu : « En 1921 le poilu ne manquera de rien ». La lassitude face à la durée de la guerre est bien visible même si la série de dessins se conclut par « Il est à peu près certain, d’ailleurs, que la guerre sera finie en 1921 ».
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Une du numéro 45
L'Argonnaute, n° 45 (mars 1918), une. Le ton se fait ici particulièrement sombre : la faucheuse, symbole de la mort, domine un champ de bataille où s'amoncellent des cadavres [Droits : Licence ouverte]
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Une du numéro 46
L'Argonnaute, n° 46- numéro de Pâques (avril 1918), une. De nouveau, le rêve du poilu d’une vie idyllique qui, cette fois, envahit tout l'espace. Un couple, dans une campagne fleurie et paisible, se repose tranquillement au bord d'une rivière [Droits : Licence ouverte]
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Début de la bataille de l'Aisne
L'Argonnaute, n° 49 (juin 1918), p. 2. « Hep !! Là !!! ». Une note ajoutée au n° 49 qui évoque le déclenchement de la bataille de l’Aisne et la perte du matériel permettant la fabrication de la publication. Annonce de la préparation d’un numéro spécial, le n° 51, qui sera consacré à cette bataille et qui paraîtra peut-être avec retard : « Il ne faut pas oublier que ceux qui écrivent ou se battent, là-bas, se battent presque tous les jours pour le salut commun » [Droits : Licence ouverte]
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Patriotisme
L'Argonnaute, n° 50 (juin 1918), p. 17. « L’Argonnaute veut la victoire », dessin paru dans le numéro du cinquantenaire. Ce dessin témoigne de la persistance des sentiments patriotiques avec cette Victoire, représentée sous les traits d’une jeune femme nue qui tient fièrement des numéros de l’Argonnaute et écrase le dragon allemand [Droits : Licence ouverte]
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Populations civiles de l'Aisne
L'Argonnaute, n° 51 (juillet 1918), p. 8. « Sur les routes de l’Aisne » : se croisent les soldats français à l’arrière-plan qui vont au combat et au premier plan, la population civile qui a reçu l’ordre d’évacuer et part en sens inverse [Droits : Licence ouverte]
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