Les correspondances de soldats obéissent à des règles assez stables : donner un signe de vie, rassurer sur la santé et le moral, raconter quelques événements militaires ou de la vie des tranchées, généralement de façon assez sobre, sans toutefois taire totalement les horreurs de la guerre et les conditions de survie déplorables des troupes.
Soldat écrivant au milieu des ruines du village de Massiges. Marne. Juillet 1915. Licence ouverte.
Ceux qui écrivent évitent le plus souvent de s’interroger sur l’utilité du sacrifice et plus généralement ils essayent d’éviter, consciemment ou inconsciemment, des sujets pouvant déplaire à la censure postale militaire. Ils se placent volontiers dans le registre patriotique et montrent un moral d’acier pour rassurer l’arrière.
Ces documents sont presque toujours datés et l’identité du producteur est généralement connue. La date de rédaction ne semble pas influer de façon notable sur la teneur générale des lettres : certes, l’adhésion face à l’engagement peut s’émousser au fil des mois passés au front mais on trouve aussi bien des remarques de combattants qui commencent à trouver le temps long dès le mois d’octobre 1914 que des lettres enthousiastes au printemps 1918.
Rares également sont les témoignages qui contiennent des commentaires sur la situation politique et militaire au risque de tomber sous le coup de la censure postale. Dans des périodes de crise, comme le printemps 1917, on trouve en revanche des textes qui dénoncent l’impéritie du commandement et se posent manifestement des questions d’ordre politique qui dépassent le cadre strict de la survie au combat et dans les tranchées.