La Première Guerre mondiale a donné lieu à de nombreuses représentations artistiques faisant usage de supports divers : peintures, médailles, cartes postales, photographie... Entre réemploi de techniques ou de références artistiques anciennes, usage de nouveaux outils (tels que la photographie qui se développe durant le conflit), recherche d'une expression individuelle de la part des artistes, censure et propagande des états engagés dans le conflit mondial qui cherchent à véhiculer un sentiment patriotique, l'activité artistique subit elle aussi, dans une proportion inconnue jusqu'alors, les contraintes de la guerre moderne. Elle en reflète aussi les évolutions.
Félix Vallotton, Le cimetière de Châlons-sur-Marne, 1917.
De plus en plus, la guerre sépare nettement combattants et non-combattants, front et arrière. Les représentations artistiques peuvent participer au lien entre ces deux espaces, comme les cartes postales, diffusées massivement auprès des populations, qui véhicule une image officielle du conflit. A ces images, la presse ajoute l'usage nouveau, en Europe, de la photographie d'actualité ; chaque semaine, l'hebdomadaire le Miroir en présente une sélection au lecteur, demandeur. Les peintres peuvent également construire une vision officielle du conflit - dès 1914, le musée de l'Armée mandate des artistes à cet effet. Mais d'autres peintres, plus jeunes ou moins connus, usent également de leur art pour représenter leur expérience directe du front.
Dossier réalisé par Camille Meister (étudiante UPON L3 "Histoire en action")
Pierre BONNARD (1867/1947) Village en ruine aux environs d’Ham (Somme), 1917, Huile sur toile 63x85cm. Centre national des Arts Plastiques, en dépôt à la BDIC. Note : Pierre Bonnard est, avant la première guerre mondiale, un peintre reconnu dans l'Europe entière. Cette peinture fut la seule qu'il exécuta en lien avec son expérience sur le terrain. Le peintre fut envoyé en mission avec d’autres artistes à la fin de l’année 1916. Ce tableau montre les destructions liées à la guerre : on y voit notamment au premier plan des habitations calcinées, et, en bas à gauche, un homme accablé (Tous droits réservés)
WAGET. Ruines de l’église de Lens, 1918, 38x45.5. Note : L’église de Lens, détruite après des combats, est ici peinte par Waget, un peintre allemand. Les couleurs rappellent celle du tableau de Vallotton. Lens, qui a perdu la moitié de sa population durant la première guerre mondiale, a été presque entièrement rasée : la ville est devenue un symbole après le conflit (Tous droits réservés).
Félix Vallotton. Cimetière militaire de Châlons sur Marne
Félix VALLOTTON (1865/1925) Cimetière militaire de Châlons sur Marne (Juin 1917), Huile sur toile 54x80cm. Note : Félix Vallotton qui avait acquis une reconnaissance européenne avant la guerre mais était trop âgé pour participer en tant que soldat à celle ci, pu néanmoins visiter le front en 1917 dans le cadre d'une mission officielle. Il y est frappé par l'importance des pertes et des tueries liées à la guerre. Comme artiste il réfléchit à la manière de peindre le conflit hors de tout héroïsme à une époque où la photographie et le cinéma proposent de nouvelles formes de représentations. Licence ouverte.
Karl LOTZE (1892/1972) Croquis de mémoire, 1915, France, Dessin au crayon 13.3x19.5. Note : Ce dessin est réalisé par un peintre allemand, Karl Lotze, stationné sur le front français. Il représente des soldats morts dans une tranchée. Dans la marge il est écrit « Nous devions traverser ce chemin matin et soir pour aller chercher la nourriture pour les tranchées » (Tous droits réservés).
Henri CAMUS 1893/1989 Tirailleurs dans les fils, 1917, dessin réalisé à l’aquarelle et encre de chine 24.5x17.2. Note : Le peintre et dessinateur Henri Camus fut mobilisé en 1914 et réalisa un grand nombre de croquis du front. Celui ci représente un homme, mort, pris dans des barbelés, les vêtements déchirés (Tous droits réservés).
Ferme des loges, à l’ouest d’Antheuil (Oise). La première ligne française, 10 juillet 1918. Tirage argentique original (13x18) thermocollé sur pages (album Valois) 21x27.2. Note : L’image montre un soldat harassé au bord d’une route. Cette photographie pose la question de la manipulation des images. Un film fut réalisé en même temps que la photographie. Celui-ci montre, à la différence de la photographie, un soldat animé, joyeux, faisant de grands gestes (Licence ouverte).
Soisson (Aisne). La vie dans la ville bombardée, 23 Août 1916, Mme MACHEREZ et Melle SELLIER munies de masques contre les gaz, Tirage argentique original (18x13cm) thermocollé sur page (album Valois) 21x27.2. Note : Les femmes ont été impliquées dans le conflit : elles ont travaillé dans les usines à la fabrication d’armement, elles ont soutenu les soldats au front. Certaines populations de l’arrière ont également dû faire face aux bombardements. Les masques que portent les deux femmes ont été introduits en mars 1916, soit quelques mois avant la date à laquelle a été prise la photo. La nouveauté que représente l'utilisation d'armes chimiques oblige soldats et populations à se protéger des gaz par le port de masques (Licence ouverte).
La nation glorieuse 1914/1915 Notre vaillante infanterie s’emparant des tranchées ennemies. Carte postale, reproduction d’une gravure, E. Ploix, 9.1x14cm. Note : Les principales représentations des scènes de combats nous sont accessibles grâce à des cartes postales. Ces représentations mettent l’accent sur la figure du héros combattant et courageux afin d'encourager le patriotisme des populations de l'arrière. L'absence d'indication de lieu montre qu'il s'agit d'une "scène type" et non de la représentation d'un combat réel. Licence ouverte.
Guerre 1914/1915. Le Bourget. Soldat faisant la soupe. Carte postale numéro 152, éditions pays de France, photocopie noir et blanc 9x14.1cm. Les images de ce type, diffusées par des cartes postales, laissent une impression de clichés pris « sur le vif » et de réalisme mais il est bien souvent question d’une mise en scène. Licence ouverte.
Campagne 1914/1917. Une tranchée de première ligne. Carte postale, éditions ND, photocopie noir et blanc 8.9x13.8cm. Note : Cette carte postale, qui ne comporte pas d'indication de lieu, montre également une "scène type". Elle cherche à véhiculer une vision rassurante plus que glorieuse des combats auprès de l’arrière. Licence ouverte.
Assaut victorieux des allemands sur le canal de l’Yser, 1914
Assaut victorieux des allemands sur le canal de l’Yser, 1914. Note : Cette carte postale représente la bataille de l’Yser d’octobre 1914, où l’armée allemande remporta une victoire. On y voit représentée la guerre de mouvement les fantassins allemands chargeant à la baïonnette et au canon des soldats français en pantalon et képi garance. La mitrailleuse, au premier plan à gauche, n'a pas encore réussie à stopper les assauts de l'infanterie. Licence ouverte.
Médaille en hommage aux mères et aux femmes de combattants
Georges-Henri PRUD’HOMME (1873 1947) Médaille en hommage aux mères et aux femmes de combattants. Plaquette en forme de tau, cintrée à la partie supérieure. Bronze, 77x70cm. Note : Cette médaille en forme de tau (type de croix) rend hommage au rôle des femmes dans le conflit en en donnant une vision traditionnelle, et largement religieuse. Sur l'avers on voit des femmes se rendant par petits groupes vers une église. Sur le revers ( non représenté ici ) on voit une femme, debout sur le rivage, guettant avec inquiétude l’arrivée d’un voilier secoué par les vagues. (Tous droits réservés)
Médaille commémorative de la bataille de la Marne.
Julien-Prosper LEGASTELOIS (1855 1931) Médaille commémorative de la bataille de la Marne. 1919. Bronze et diamant, 68mm. Coll BDIC. Légende « Bataille de la Marne. Septembre 1914. » Note : Sur cette médaille est représentée une allégorie de la victoire, épée à la main, survolant artilleurs et fantassins français, prêts à combattre. Cette médaille s'inscrit dans la ferveur commémorative qui en France suit la victoire de 1918. Licence ouverte.