L’entre-deux-guerres est le théâtre de nombreux bouleversements. Après une période de reconstruction et d'accalmie, les crises touchent de nouveau l'Europe. Les indicateurs économiques et sociaux laissent présager le pire. Ce sont ensuite les régimes politiques instables qui se brisent et laissent place à de nouveaux acteurs qui transforment dangereusement les sociétés occidentales. Dès les années 1920, des régimes autoritaires se mettent en place, notamment en Europe de l'est et en Italie. La décennie suivante voit sombrer d’autres régimes qui, trop faibles, laissent ainsi le champ libre aux totalitarismes.
Ce dossier s'intéresse à la montée de ces tensions multiples à travers le fonds d’archives de la BDIC qui conserve les dessins de presse réalisés par le caricaturiste Jean Sennep, personnage complexe et très représentatif de la période.
Né à Paris en 1894 et décédé presque un siècle plus tard, en 1982, Sennep collabore durant l’entre-deux-guerres à de nombreux journaux, dont Candide et Paris Soir Dimanche. Candide est l’un des principaux hebdomadaires de cette période. Il traite essentiellement de politique et affiche des idées très conservatrices, voire racistes. Dès 1934, le journal renforce ses positions et se radicalise encore davantage. Tout comme une grande partie de la société, Candide n’hésite pas à développer des thématiques anti-communistes, racistes, xénophobes et antisémites, voire antirépublicaines. Ces positions lui valent un succès grandissant durant l’entre-deux-guerres. Paris Soir est fondé quant à lui en 1923 par un anarchiste, Eugène Merle. Les pages dans lesquelles publiait Sennep, Paris Soir Dimanche n’ont existé qu’entre 1935 et 1939. Ce journal connut rapidement un grand succès grâce à ses pages aérées, rares pour l’époque, et la large place qu’y tenait l’illustration. Ce périodique doit être vu avant même d’être lu, selon son slogan. Cela explique d’ailleurs que l’on trouve dans le fonds Sennep de nombreux dessins pour Paris Soir datés du même jour.
L’art de la caricature est ancien et a, au cours de toutes les époques, suscité le rire autant que les tensions, tout en dénonçant parfois des événements d’une réelle gravité, comme nous allons le voir dans ce corpus de dessins révélateurs des dérives fascistes en Europe.
Dossier réalisé par Olga de March (UPOND - L3 "Histoire en action")
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Publiée dans "Candide", le 13 août 1936
Les deux personnages représentés sur ce dessin sont Jean Zay (ministre de l’Education nationale et des Beaux-Arts) et Léon Blum, qui dirige le gouvernement de Front populaire depuis juin 1936.
Ce dessin est intitulé « Au comité Amsterdam-Pleyel », en référence à la salle Pleyel, salle de concert parisienne, et au « comité Amsterdam ». Le comité Amsterdam a été créé en 1932 à l’initiative d’Henri Barbusse, dans le but de s’opposer à la guerre et de prôner la paix en Europe. Malgré une certaine opposition des socialistes qui s’inquiètent du rôle de premier plan qu’y joue le parti communiste, le comité se réunit en 1933 dans la salle Pleyel, à Paris – et prend alors le nom de « comité Amsterdam-Pleyel ». Dans les années qui suivent, le comité affiche nettement une position antifasciste, mais ne parvient pas véritablement à incarner une politique efficace contre la montée des périls.
C’est cette déception que traduit Sennep grâce à sa légende « Voilà !... rien que des soupirs », et à l’attitude désemparée de Léon Blum contraint d’exécuter au piano une partition où ne figurent que des silences (des « soupirs », justement), tenue par son ministre des Beaux-Arts, dont l’influence politique est ainsi suggérée.
Ce dessin, plus largement, cible essentiellement Léon Blum : en effet, le parti de ce dernier est l’une des causes de l’échec de l’union de la gauche contre le fascisme. La SFIO refuse de participer en 1934 à ce rassemblement et créé un contre mouvement qui ne se réclame d’aucune organisation.
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Candide, le 4 août 1938
Sur ce dessin publié en aout 1938, est représenté Maurice Thorez, secrétaire général du parti communiste français dans l’entre deux guerres. Farouche opposant à Mussolini et Hitler, il admire à l’inverse le régime soviétique et son dictateur Staline. Ici, Sennep se moque directement du charismatique leader communiste, qu’il représente sous les traits d’un homme beau, hâbleur et élégant : Thorez mettait un point d’honneur à porter la cravate et le faux-col, notamment pour se rendre à l’assemblée, ce qui pouvait surprendre pour un élu communiste – et ce que Sennep ne manquait jamais de rappeler, comme il le fait ici. Cette représentation peut paraître flatteuse mais le caricaturiste dénonce ici l’attitude d’un politicien qu’il présente comme un vulgaire vendeur à la criée, prêt à tous les marchandages pour vendre ses idées comme on vend des cravates – mettant au passage en doute la sincérité d’un « et à bas Mussolini » qui parait ici n’être qu’un élément parmi d’autres d’un discours bien rôdé de bonimenteur, présenté comme une petite prime offerte pour emporter l’adhésion d’un « acheteur / électeur » potentiel.
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Staline et le croissant
Sur cette caricature publiée le 28 juin 1936 dans Paris soir dimanche, on observe Staline, muni d’un marteau, tentant de frapper sur le croissant de lune. La ligne d’horizon qui représente une ville orientale fait immédiatement penser à la Turquie, dont le drapeau est justement constitué d’un croissant et d'une étoile. Ce pays entretenait alors des relations complexes et conflictuelles avec la Russie de Staline. Le caricaturiste joue ici avec les symboles. Le croissant associé au marteau que brandit Staline rappelle évidemment le symbole communiste, la faucille et le marteau. De plus, la présence d’étoiles fait également référence à l’étoile rouge du drapeau communiste – étoile que l’on voit sur la poitrine du chef d’Etat, et qui symbolise pour les socialistes l’union de tous les travailleurs. Le but de ce dessin est donc de dénoncer la menace croissante du dictateur soviétique à l’égard de la Turquie, qui tente alors de se maintenir dans une situation de neutralité qui déplait fortement à la Russie.
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Candide, 24 février 1938
Ce dessin dénonce l’omniprésence des paroles haineuses et antisémites. En effet, à la veille du conflit mondial, la haine transpire des discours xénophobes du chef du parti nazi. L’agrandissement important de l’oreille du personnage peut être interprété comme l’accroissement de la portée du discours d’Hitler et la prédisposition de plus en plus grande à écouter et accepter ces discours. Enfin, l’expression du visage, un air résigné, presque blasé renforce l’idée de la récurrence des mêmes discours haineux et de leur multiplication. Le personnage représenté est Yvon Delbos, alors ministre des Affaires étrangères. Homme politique de la troisième république, il fait partie du RRRS (parti républicain, radical et radical-socialiste) qui fut limité dans ces actions en raison de nombreux désaccords. Le choix de représenter Yvon Delbos n’est pas anodin. En effet, malgré une période aux côtés de Léon Blum, il adopte une position, très conciliante concernant les actions de l’Allemagne qui débute déjà la guerre. Ce dessin, publié le 24 février 1938 annonce les hésitations de la France, confirmées au moment de l’Anschluss engagé par Hitler le 12 mars suivant.
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Le chien de garde
Sur cette caricature parue le 13 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche, on peut voir Hitler caricaturé en chien de garde, tandis que Staline (reconnaissable à sa moustache et à son étoile rouge sur la poitrine), est curieusement représenté sous les traits d’un minuscule vagabond apeuré. Tenu en laisse, courant et aboyant, comme un chien de garde lancé aux trousses d’un passant, le dictateur entraîne dans sa course menaçante la « villa Europe » qui ne peut résister à cette violence. Une vieille femme à la fenêtre de la maison hurle « Ici Adolf », pour tenter, en vain, de l’arrêter.
Très clairement, il s’agit ici pour Sennep de caricaturer la diplomatie européenne qui, malgré ses hauts cris, ne parvient pas à stopper la course folle d’Hitler qui entraîne l’Europe vers la guerre et le chaos. Derrière cette première lecture, se dessine aussi l’image de la puissance hitlérienne, animalisée mais redoutable comme un chien féroce, face à une Russie qui, par bien des aspects, semble à cette époque ne pas être en mesure de s’opposer à une éventuelle attaque allemande.
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Dessin publié le 25 octobre 1936 dans Paris Soir Dimanche
Sennep représente ici le comte Ciano. C’est un proche de Mussolini, fasciste de la première heure qui gravit rapidement les échelons, tout d'abord en épousant une des filles du dictateur italien. Ministre de la propagande, il signe en mai 1939, pour l'Italie, le pacte d'acier ou traité de Berlin, qui scelle l'union entre l'Italie fasciste et l'Allemagne nazie. L'illustrateur compare Ciano à Romulus, fondateur de Rome. Le ministre fonde en réalité ce qui devient en 1939 un véritable axe fasciste européen. En effet, le comte Ciano est chargé d’établir un lien fort menant à une alliance entre l’Italie et l’Allemagne en rencontrant à de nombreuses reprises le Führer. Via la métaphore de la construction de Rome (délimitée par le tracé d’une charrue) avec le dessin de la croix gammée utilisée par Hitler, Sennep critique fortement la position italienne qui, de fait, place l’Italie dans la dépendance de l’Allemagne.
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Publié dans Paris Soir Dimanche, le 18 octobre 1936
Sur ce dessin est représenté Rudolf Hess, secrétaire d'Hitler qui l'avait désigné comme son dauphin. L'illustrateur lui fait dire que le beurre est remplacé par le Krupp. Krupp est une entreprise d'acier allemande qui s'est alliée aux nazis, fabriquant ainsi de nombreuses armes telles que le canon ici représenté. Ce dessin tente donc d'expliquer que toute l'économie change avec le conflit mondial et que l'on assiste au développement d'une économie de guerre, privilégiant les dépenses militaires. L'exemple du beurre est significatif, puisqu'il est considéré comme un élément de base de l'alimentation. Nous pouvons également supposer que ce dessin est une réaction aux évènements survenus quelques jours plus tôt. En effet, le 6 octobre, le chef du gouvernement hongrois meurt. Son successeur est alors contraint par Hitler à adopter la politique nazie et lance un vaste programme de réarmement de la Hongrie.
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La roulette de Monte-Carlo (recto)
Ce dessin devait être publié dans Paris Soir Dimanche, mais pour une raison inconnue cela n’a pas été le cas. Il est daté du 11 octobre 1936. Cette caricature intitulée « La roulette de Monte-Carlo » représente un seul visage, celui d’Anthony Eden. Membre du parti conservateur britannique, il a occupé de nombreux postes dont celui de premier ministre après la fin du second conflit mondial. Avant-guerre, il fut notamment député mais surtout secrétaire des affaires étrangères et du Commonwealth entre 1935 et 1938. Il est favorable à une position ferme face aux dictatures européennes et dénonce la passivité de Chamberlain. Ainsi, il démissionne en 1938 pour se rallier à Churchill qui partage ses idées.
Ici, la tête d’Eden remplace la boule qui sert à jouer à la roulette. La veille de la publication, Eden était à Paris afin de rencontrer Léon Blum au sujet du traité de non intervention en Espagne, destinée à éviter un embrasement général de l’Europe sur le terrain espagnol. De nombreux pays étaient concernés et tentaient de trouver une entente à ce sujet. C’est pourquoi ce sont des pays qui sont représentés à la place des nombres sur cette roulette. Si Sennep fait référence à la roulette et donc au casino c’est parce qu’Eden a séjourné brièvement sur la côte d’Azur connue pour ces jeux et casinos avant de venir à Paris, mais il dénonce surtout la complexité des négociations menées par Eden à travers toute l’Europe, sautant d’un pays à l’autre comme une boule de roulette. Le fait que la tête de Eden soit finalement positionnée sur l’Allemagne n’est évidemment pas un hasard : ce traité était considéré par beaucoup comme une victoire de l’Allemagne qui put, de fait, soutenir par la suite presque sans entraves le combat de Franco. C’est Anthony Eden qui est représenté et non d’autres hommes politiques puisqu’il est comme nous l’avons vu ministre des affaires étrangères de l’Angleterre, à l’origine de cette politique de non-intervention. Il fut le principal artisan de la fondation du comité de non-intervention en Espagne, basé à Londres.
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Le chouchou de Nuremberg
Ce dessin a été publié le 13 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche. La même semaine que la publication de ce dessin se tenait le 8e congrès du parti nazi à Nuremberg durant lequel le parti accentua davantage sa politique de réarmement en vue d’une guerre. De plus la rime enfantine entre joujou et chouchou rappelle que le congrès est largement dirigé en direction de jeunesse. Ce grand rassemblement était une nouvelle occasion pour le parti d’étendre son influence et d’inculquer son idéologie essentiellement à la jeunesse qui constitue une armée forte, motivée et nombreuse pour combattre les juifs ou encore le bolchevisme, principaux ennemis du régime. On y voit Hitler au centre. Les congrès du parti nazi donnaient toujours lieu à de spectaculaires mises en scène. Il est caricaturé tel une figurine pour enfant, en référence à la production importante de jouets à cette époque dans la ville de Nuremberg. La légende « le chouchou de Nuremberg » accentue le ridicule du dessin.
Le dictateur est entouré de bras tendus, faisant le salut nazi. Il est inscrit « Heil » référence au nazisme qui a déjà envahi la population et à l’adoration que portait une partie des Allemands au dictateur.
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La lire ballila
Ce dessin a été publié dans Paris Soir Dimanche le 11 octobre 1936. On y voit le dictateur italien, Benito Mussolini faisant un salut fasciste. A ses pieds, on peut observer un petit personnage dont la tête a été remplacée par une pièce de monnaie. Il s’agit de la lire, monnaie italienne. Le titre « la lire Balilla » fait référence à l’histoire italienne. En effet, Balilla est le surnom de Giovani Battista Perasso, jeune homme qui aurait déclenché la révolution italienne de 1746 se battant contre l’occupation autrichienne. Le dictateur se sert de ce symbole pour illustrer le courage italien et utilise ce surnom pour nommer son organisation de jeunesse. Comme les jeunesses hitlériennes, cette organisation a pour but d’inculquer dès le plus jeune âge le culte du chef, la doctrine fasciste ainsi que le culte du corps et l’envie de se battre pour sa patrie. Ici, Sennep dénonce ce système et la soumission du peuple au dictateur et la volonté de contrôle du Duce jusque dans le système monétaire qui sert entièrement la politique de remilitarisation de l’Italie.
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Candide, le 10 février 1938
Sennep a ici une nouvelle fois caricaturé Yvon Delbos. Une fois encore, ce dessin dénonce la complaisance du ministre des affaires étrangères à l’égard de la politique expansionniste de l’Allemagne, même s’il se montre plus indulgent que celui publié dans le même journal le 24 février. En effet, la girouette en forme de croix gammée et le point d’interrogation au dessus d’Yvon Delbos marquent encore une hésitation quant à l’attitude à adopter face à la férocité nazie. Cependant, le caricaturiste dénonce déjà l’attitude du parti radical. On peut y voir une double dénonciation. D’une part, Sennep critique l’hésitation des politiques et plus généralement de la France, quelques mois avant les accords de Munich. D’autre part, la forme de la girouette que tient Yvon Delbos dénonce clairement le parti-pris de l’homme politique. En effet, le France aimerait grâce à des stratégies diplomatiques éviter un conflit armé qui nuirait à l’Europe tout entière.
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Le règne de Staline
Ce dessin a été fait pour Paris Soir Dimanche. Il devait paraître le 30 août 1936, mais pour des raisons inconnues il n’a finalement pas été publié.
On y voit Staline, caché sous un lit, équipé d’un téléphone et d’une arme. Sennep fait sans aucun doute référence aux procès de Moscou, simulacre de justice pour les opposants au dictateur. En effet, les condamnés sont exécutés le 25 août, soit 5 jours avant ce dessin. Cette caricature présente le dictateur sous les traits d’un conspirateur de bas étage, caché sous son lit. « Le règne de Staline » évoqué par la légende est ici présenté comme le règne d’un vulgaire criminel, pratiquant la délation et l’exécution sommaire - l’arme à ses côtés rappelant aux lecteurs que Staline arriva au pouvoir par la violence
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Le Locarnivore
Sur cette caricature, publiée le 27 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche, on reconnaît le dictateur allemand Adolf Hitler. Le dessin intitulé « Le Locarnivore » dénonce le non-respect du traité de Locarno par l'Allemagne. Le traité de Locarno, signé en octobre 1925, prévoyait entre autres le maintien des frontières de l'époque. En signant ces accords et en les ratifiant, l'Allemagne s'engageait donc à ne pas violer les frontières établies, en particulier celles de la Tchécoslovaquie et de la Pologne, même si le régime nazi ne les reconnaissait pas. Cependant, le 7 mars 1936, les troupes hitlériennes avaient brisé une première fois ces accords en envahissant la Rhénanie, zone démilitarisée depuis le premier conflit mondial. Ainsi, par son dessin, le caricaturiste souhaite montrer comment les troupes hitlériennes, en toute impunité, ont mit fin à ces accords qui ont tenté en vain de préserver la paix en Europe. Le titre de ce dessin « Locarnivore » rappelle le terme de carnivore qui donne un caractère bestial et féroce à Hitler
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Le dernier balcon où l'on cause
Ce dessin a été publié le 20 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche. On y voit Mussolini dans un canon faisant le salut fasciste. Sennep, en dessinant Mussolini dans cette position tente d’avertir sur la dangerosité potentielle du Duce. Ensuite, la légende du dessin « le dernier balcon où l’on cause » fait sans doute référence aux négociations en cours avec l’Allemagne afin de créer un axe Rome-Berlin qui servirait les intérêts des deux puissances fascistes. Ces discussions laissent donc présager que le dialogue n’est plus possible avec l’Italie. Mais Sennep fait surtout référence aux nouveaux crédits accordés à l’armement. En effet durant tout le mois d’août, le conseil des ministres italiens a discuté sous les ordres de Mussolini des nouveaux crédits à allouer à l’armement et à la défense. Ainsi, cette augmentation conséquente des crédits consacrés est actée par le communiqué du conseil des ministres le 12 septembre 1936. L’augmentation est considérable et confirme la tendance européenne de réarmement.
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Paris Soir Dimanche, le 11 octobre 1936
Cette caricature publiée le 11 octobre 1936 dans Paris Soir Dimanche représente Goering et Schacht, deux figures du IIIe Reich. Nous avons précédemment vu que Goering était un des plus proches collaborateurs du Führer. Schacht quant à lui fut également au service du régime nazi puisqu’il en fut notamment le ministre de l’économie entre 1934 et 1937 développant un modèle économique autarcique. Malgré ce point commun, les deux dirigeants nazis sont régulièrement en conflit, notamment au sujet des dépenses militaires allemandes. Ce dessin, publié un an avant l’éviction de Schacht, traduit le fait que les choix politiques de Goering en faveur des dépenses d’armement l’emportent largement, dès cette époque, sur la politique de rigueur économique défendue par Schacht.
Il se moque également du physique peu gracieux de Goering qui, on le sait, était très corpulent, pesant ainsi plus que son concurrent dans la balance.
C’est d’ailleurs Goering qui prendra la succession de Schacht à la tête du ministère de l’économie, en 1937.
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Je trouve le rata excellent
Sur cette caricature publiée dans Paris Soir Dimanche le 11 octobre 1936, on peut reconnaître Hitler et Goering. Hermann Goering est un homme politique allemand nazi qui fut plusieurs fois ministre pour le compte du IIIe Reich. En 1936, il cumule de nombreux postes : Il est député, ministre des forêts, président du Reichstag, ministre de l’aviation mais aussi ministre-président puis Reichsstatthalter (autrement dit gouverneur) de Prusse. C’est de ce cumul des fonctions dont se moque Sennep dans cette caricature. En effet, il fait dire la phrase suivante au dignitaire nazi : « J’ai un devoir : me faire confectionner un uniforme de maréchal des cuisiniers ».
Cette phrase fait écho à celle d’Hitler qui se dit satisfait du rata. Le rata est un ragout grossier généralement peu apprécié. Le fait d’avoir réussi un rata excellent selon Hitler, permettrait alors à Goering d’obtenir une nouvelle fonction, celle de maréchal des cuisiniers. Cette moquerie est accentuée par le détournement des attributs de cuisiniers tels que la toque, les casseroles ou encore les saucisses qui parodient les insignes, uniformes et médailles attribués normalement à un militaire pour ses actes de bravoure ou sa bonne conduite.
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Nourriture spirituelle
Ce dessin a été publié le 20 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche. On y voit Hitler tenant le rôle de cuisinier et servant un plat prenant la forme d’une croix gammée à un homme visiblement contrarié. Ce convive, « Michel », pourrait être Miklos Horthy, qui dirige alors la Hongrie bien que son nom ne soit pas mentionné au verso de la caricature comme Sennep le fait couramment. Le pays très conservateur, s’appuie d’ailleurs sur les lois antisémites promulguées en Allemagne pour discriminer les juifs dans son propre pays.
Ainsi, le titre du dessin « Nourriture spirituelle », ainsi que la légende faisant dire au hongrois « Toujours le même plat » peut guider l’interprétation. En effet, le plat servi ressemble à une galette rappelant ainsi l’ostie des catholiques et donc l’importance de la religion en Hongrie, pays très conservateur. Le fait qu’Hitler serve toujours le même plat souligne le caractère lassant et étouffant de la pression nazie sur le pays. La Hongrie, littéralement nourrie de nazisme, adopte néanmoins des lois très proches de celle du IIIe Reich et obtient ainsi les faveurs de Berlin, tout en maintenant une ligne très conservatrice et religieuse.
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La corrida ( recto )
Ce dessin a été publié le 9 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche. On y voit ce qui ressemble à une corrida puisqu’un taureau dont les cornes sont remplacées par des poings levés est représenté au milieu de la piste : le taureau, puissant mais par avance condamné à être mis à mort, est de toute évidence une représentation de la gauche espagnole. Les spectateurs présents sont, dans l’ordre : le général Franco, Mussolini, Hitler, Staline et Blum. Au bas de la caricature nous pouvons lire le poème suivant : « Le cirque est plein, c’est jour de fête ! Le cirque est plein de haut en bas… Les spectateurs perdent la tête, s’interpellent à grands fracas ». Ce texte décrit parfaitement la posture des protagonistes : alors que Mussolini pousse Franco à entrer l’arène pour mettre à mort le taureau républicain, Staline retient Hitler qui fait mine de vouloir y aller et lui intime l’ordre de sortir – tandis que Léon Blum retient pour sa part Staline par la veste, rappelant par ce geste son attitude attentiste face aux demandes d’intervention formulées par les communistes français.
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